Dans mon rôle d’Agile Master, j’ai été confronté à deux problématiques dans l’une des équipes que j’ai pu suivre :
- les développeurs étaient très dépendants de leur leader technique, entraînant alors des lenteurs dans les développements et les livraisons car ils avaient besoin de son aide ;
- des départs pour diverses raisons : changement de projet, congés parental, etc.
Ces deux problématiques m’ont mené à un réel problème qui peut rapidement devenir critique : la perte de compétences. Après quelques recherches et discussions avec des pairs, j’ai mis en place un outil simple mais extrêmement efficace : la matrice de compétences.
Cette matrice m’a permis de voir en un coup d'œil quel était le niveau de mon équipe sur ses compétences clés.
Comment j’ai mis en place cette matrice de compétences
Pour mettre en place cet outil et avoir une première vision, j’ai procédé en plusieurs étapes.
Tout d’abord, avec l’aide de l’équipe, j’ai listé toutes les compétences nécessaires pour son activité, qu’elles soient techniques (comme le niveau de maîtrise d’un langage) ou plus orientées produit (comme la maîtrise d’un périmètre applicatif). Il est également possible de rajouter une partie concernant les outils et soft skills.
Ensuite, chaque membre de l’équipe s’est auto-évalué sur son niveau de maîtrise pour chaque compétence. Pour cela nous avons utilisé une échelle simple en trois niveaux :
- 1 : Je débute, j’ai besoin d’accompagnement.
- 2 : Je suis autonome, je peux gérer seul.
- 3 : Je suis expert, je peux former les autres.
Puis, j’ai structuré tout cela sous forme d’un tableau, et avec l’équipe nous avons échangé sur les points forts, les lacunes, et surtout les compétences sur lesquelles nous étions trop dépendants d’une seule personne.
Pour finir, nous avons mis en place les actions nécessaires pour relever le niveau de maîtrise des compétences sur lesquelles l’équipe était faible, notamment via des sessions de transfert de connaissances des sachants vers les personnes demandant de l’accompagnement.
Ce que la matrice de compétences nous a apporté
Avec cette matrice, nous avons pu voir plusieurs améliorations au sein de l’équipe. En premier lieu, une amélioration de la polyvalence des équipiers grâce aux sessions de transferts de compétences mises en place. Cela a permis à l’équipe d’être plus efficace face aux imprévus. Elle a également pu réduire le risque de dépendance, et notamment celle autour du leader technique. Il a ainsi pu se consacrer à d’autres tâches. Ce nouveau fonctionnement a alors permis de rassurer tout le monde en cas de départ d’une personne de l’équipe.
Tout cela a favorisé la création d’une dynamique de développement personnel. Les équipiers étant motivés à progresser, voyant que cette évolution était valorisée au sein de l’équipe et par les parties prenantes.
Les pièges à éviter
Voici les quelques erreurs que j’ai pu faire ou les pièges dont on m’a parlé :
- Ne pas maintenir la matrice de compétences : la matrice doit être régulièrement mise à jour pour rester pertinente, que ce soit en termes de compétences ou d'évaluation. Cette fréquence de mise à jour est à définir avec l’équipe. Dans notre cas, nous avons choisi une mise à jour mensuelle lors des points techniques de l’équipe.
- Garder un esprit collaboratif : si la démarche est perçue comme un outil de contrôle, elle peut démotiver l’équipe. J’ai donc fait en sorte de bien expliquer à l’équipe que c’était un outil de pilotage des compétences, qui était là pour les aider à évoluer et non pour les évaluer, et qui restera en interne à l’équipe.
- Aller à l’essentiel : ne pas lister trop de compétences au risque de rendre l’exercice de mise à jour fastidieux. Mon conseil : se concentrer sur les compétences qui sont vraiment essentielles aux activités de l’équipe.
Pour aller plus loin
Les actions à mener ne sont pas forcément qu’interne à l’équipe, elles peuvent également concerner l’organisation : demandes de formations, certifications, coaching/mentorat, recrutement, réorganisation de l’équipe, etc. Ne pas hésiter alors à les lister, au même titre que celles internes à l’équipe, à les remonter aux personnes qui peuvent avoir un impact dessus et à suivre leur avancement.
Il est également possible d’ajouter un nouvel axe, le niveau d’appétence, avec sa propre échelle (-, 0, +, ++ ; vert/orange/rouge ; smiley…). Ce niveau permet de déterminer si la personne, même si elle ne maîtrise pas une compétence, souhaite l’apprendre ou non. Cela peut aider à identifier les plans de montées ou de transferts de compétences à mener.
Si une compétence n’est pas maîtrisée par l’ensemble de l’équipe, cela peut être l’occasion de se demander si cette compétence est toujours d’actualité, s’il ne faudrait pas la changer, etc. C’est ainsi l’occasion de lancer des débats structurants qui peuvent aller au-delà des compétences.
Adopter la matrice de compétences a été une véritable aide pour mon équipe et moi-même. Cela nous a permis de mieux comprendre les forces et les faiblesses de chacun, d’anticiper les risques, et surtout de construire une équipe plus forte et plus autonome.
C’est une démarche qui demande un peu de temps et d’efforts à mettre en place, mais qui en vaut largement la peine. Si je devais prodiguer un conseil, ce serait de ne pas hésiter à impliquer votre équipe dans le processus. C’est ensemble que vous en tirerez le plus grand bénéfice.
Et vous, avez-vous déjà essayé une matrice de compétences ? Quels ont été vos résultats ? 😊